Une étude récemment publiée par la FMH et la KPMG montre que la digitalisation des données dans le système de santé est une question controversée. De nombreuses personnes qui, en principe, pourraient tirer un avantage de la digitalisation, émettent cependant des réserves concernant ce sujet.
Réponse de l’Association Suisse des Médecins Indépendants (ASMI) à l’article de la Berner Zeitung « Ärzte haben wenig Lust auf Digitalisierung » :
Mme Gilli, médecin et membre du Comité central de la FMH, a pris position : « Paradoxalement la gestion électronique des données des patients augmente souvent la charge administrative, car les mêmes données doivent être saisies et réintroduites à plusieurs reprises ».
De nombreux prestataires de services sont confrontés à ce problème. Si l’on considère que le Dossier Electronique du Patient (DEP) a été introduit dans le but de réduire la charge administrative, on doit cependant constater que cet objectif n’est pas atteint.
L’ASMI a déjà souligné lors des consultations concernant le DEP que si l’on considère trois domaines à savoir celui de la sécurité des patients, celui de la protection des personnes et de celui de l’efficacité, l’on aboutit à une incompatibilité évidente. En effet, l’on ne peut satisfaire qu’au maximum deux de ces critères en même temps.
Si une protection maximale de la personnalité est souhaitée, le patient doit pourvoir choisir quelles informations seront saisies dans le DEP. Il doit pourvoir ainsi empêcher l’enregistrement de maladies stigmatisantes ou de traitements permettant de conclure à l’existence de telles maladies. Le modèle suisse cherche absolument à satisfaire cette préoccupation du respect de la sphère privée.
Considérant la sécurité des patients, il faudra donc admettre que le médecin ne pourra pas se fier aveuglement aux données du DEP. Par conséquent, en raison de sa responsabilité et des dispositions légales relatives à la responsabilité médicale, le médecin devra effectuer des recherches pour compléter les données, recherches qui auront déjà été effectuées auparavant. Cette duplication ne serait pas nécessaire si l’on pouvait supposer que le dossier serait complet par exemple en rendant obligatoire l’enregistrement de toutes les données du patient. Dans un cas, le patient a la responsabilité personnelle de fournir toutes les informations de manière proactive, ce qui est délicat si l’on considère que le patient ne sait peut-être même pas quelles informations sont nécessaires. Dans cette situation, le médecin par les dispositions légales sera amené à compléter les informations ; cette démarche rend évidement caduque l’objectif d’efficience recherché par le DEP. Dans la situation d’une obligation d’enregistrement des données, la protection de la personnalité est abandonnée au profit de la sécurité du patient.
Si l’on considère finalement que toutes les infrastructures pour la mise en œuvre du DEP (ordinateurs, logiciels, mises à jour etc.) ont un coût non négligeable – coût non considéré actuellement dans le TARMED – le rapport coûts-bénéfice apparait pour l’heure très insuffisant.
Le DEP devrait rendre la gestion administrative et les processus plus simples et non plus coûteux. Le manque d’efficacité sera assumé par l’ensemble des payeurs de primes et par les contribuables.
De plus, la protection de la personnalité nécessite la mise place d’un cadre stricte qui respecte la sphère privée des patients. Les médecins, les pharmaciens et leur personnel sont soumis au secret professionnel. L’introduction du DEP ne doit pas remettre en question le secret professionnel qui garantit la relation médecin-patient.
Seul un DEP n’augmentant ni la charge administrative, ni les coûts et qui respecte la sphère privée du patient serait acceptable. Tout autre dérive par le DEP doit être refusée.